Odile et Jacques

Odile et Jacques
Odile et Jacques

jeudi 29 juin 2017

L’ARCHIPEL DES ACORES, UN PEU D’HISTOIRE...


Au point de rencontre de trois plaques tectoniques, l’archipel des Açores est formé de neuf îles volcaniques, 760M à l’Ouest du Portugal :
-           - le groupe occidental est formé de Corvo et Flores, l’île chérie des navigateurs pour la beauté de ses paysages ; l’exiguïté du port, la météo et notre problème d’inverseur nous ont conduits à abandonner l’idée d’y atterrir,
-          - le groupe central, Terceira, Graciosa, Sao Jorge, Pico et Faial vers lequel nous nous dirigeons,
-          - le groupe oriental avec Sao Miguel et Santa Maria.

Ces îles alors inhabitées, ont été officiellement découvertes par les Portugais Diogo de Silves et Diogo de Teive à partir de 1427 ; Cabral devient le premier gouverneur ou capitaine-donataire de Sao Miguel ; Portugais puis Flamands mais aussi Bretons et Normands s’y installent et plantent blé, vigne, canne à sucre et orangers.
En 1583, le roi du Portugal décède sans successeur, Philippe II d’Espagne envahit le Portugal mais l’île de Terceira met en déroute les Espagnols et devient autonome. Beaucoup d’Açoriens émigrent vers le Brésil.
Les Açores deviennent une escale incontournable sur la route des Amériques et des Indes, le commerce maritime est florissant ; ceci attire pirates et corsaires, anglais ou français, qui ont coulé nombre de galions espagnols revenant d’Amérique.
En 1640, le Portugal retrouve son indépendance et les Açores lui sont rattachées.
En 1766, un gouvernement central dirigé par un seul capitaine général est installé à Terceira par le marquis de Pombal.
Lors de la guerre civile portugaise qui suit la révolution de 1820, Terceira prend le parti pour les Libéraux de Dom Pedro qui utilise l’île comme quartier général pour planifier l’invasion du Portugal ; les Absolutistes sont défaits.  
Les Açores deviennent une province, les îles sont regroupées en trois districts administratifs autour des ports principaux de Horta, Punta Delgada et Angra.
Elles vivent de l’agriculture, de l’élevage, de l’activité portuaire et de la pêche à la baleine ; de nombreux Açoriens, considérés comme les meilleurs pêcheurs de baleines du monde, se sont embarqués sur les baleinières américaines ; beaucoup ont émigré, certains sont revenus développer l’industrie locale.
En 1893, le premier câble sous-marin relie les Açores à Lisbonne.
En 1910, la monarchie est renversée, le Portugal devient une république ; lors de la première guerre mondiale, les Américains installent des bases navales dans l’archipel.
Lors de la seconde guerre mondiale, le dictateur Salazar sort le Portugal de sa neutralité et autorise les Alliés à construire des bases aériennes sur Terceira et Santa Maria.
La dictature portugaise d’extrême-droite s’achève en 1974 avec la Révolution des Œillets.

Les Açores deviennent une région autonome avec un gouvernement et un parlement propres.

Du lundi 22 mai au dimanche 18 juin 2017 : MARINA HEMINGWAY (CUBA) – HORTA (FAIAL, ACORES, PORTUGAL) (3 469M)

Voici venu le moment du départ pour cette transat retour, tant redoutée mais aussi tant désirée : 1 100M jusqu’aux Bermudes, puis 1 700M jusqu’aux Açores, au total 2 800M sans compter les zigzags que nous ferons inévitablement pour éviter les dépressions.
Sur les conseils de nos amis routeurs Joël et Pierre-Henri, on a attendu que le vent d’Est se calme et qu’il tourne au Sud ; ceci afin d’éviter de louvoyer avec un vent contre courant qui lève une grosse mer, comme nous l’avions expérimenté à notre arrivée sur Hemingway.

J1 : lundi 22 mai / mardi 23 mai
Départ en fin d’après-midi après une brève averse, gros nuages noirs.
Le dockmaster de la marina nous réclame fort habilement un « pourboire » ; c’est le seul fonctionnaire parmi ceux que nous avons rencontrés à Cuba qui l’ait fait.
Les formalités de sortie se passent bien ; le douanier chargé démailloter notre Iridium n’y voit que du feu, à moins qu’il fasse semblant de ne rien voir.
A 19 heures, nous sommes libres ; sortie du chenal, on hisse les voiles en gardant nos deux ris pour une nuit tranquille (bon plein, petit 4, mer peu agitée), repas puis branle-bas de combat pour éviter de justesse un filet dérivant heureusement éclairé ; deux virements de bord et on reprend notre route.
Nuit étoilée, sans lune ; on voit longtemps les lueurs de La Havane qui servaient de repère au « Vieil homme et la mer ».
Beaucoup de cargos, on croise leur route pour se rapprocher davantage de la Floride.

Le vent monte en milieu de nuit (bon plein, force 5, mer peu agitée), on enroule du génois ; emmenés par le Gulf Stream (environ 2,5 nœuds), on fait des pointes à 10,4 nœuds ! Quelques vagues submergent le bateau mais la houle nous laisse dormir un peu.








Beau lever de soleil sur les Bahamas.










Le vent tourne et faiblit (travers, force 4) ce qui rend la navigation plus confortable, on enlève un ris.
On file très vite (parfois à plus de 11 nœuds) vers les Straits of Florida, passage entre la Floride et les Bahamas mais on abat et le vent faiblit, on se traîne (grand largue, force 3)... Des cargos au loin, aucun voilier ; pas de terre en vue non plus.

Bilan J 1 (de 19H à 19H ; par commodité on garde l’heure antillaise sur le bateau, soit UTC - 4 ou France – 6)
Position : 25°18’ N ; 79°50’ W
Route : 197M, ce sera sans doute notre record !
Moteur : 1H au départ de Cuba
Bilan énergétique équilibré ; on a dû par deux fois enlever les sargasses qui bloquaient l’hydrogénérateur
Pêche : on va trop vite pour mettre les traînes à l’eau !
Repas : dorade coryphène, bananes plantains, crème caramel maison.

J2 : mardi 23 mai / mercredi 24 mai
Au large des îles Bimini, le vent monte, on prend le deuxième ris au changement de quart de minuit (grand largue, force 5, mer belle), le bateau semble glisser sur l’eau.
Une dépression s’annonce sur l’Est de la Floride, au Nord des Bahamas ; à quatre heures du matin, on pique vers l’Est dans le Providence Channel qui passe entre Great Bahama et Great Abaco Islands au Nord et Andros au Sud (travers puis bon plein, force 6 devenant 5, mer peu agitée, deux ris et un bout de génois). On avance mais le Gulf Stream ne se fait plus sentir.
On ralentit pour laisser passer un grain, le vent est perturbé ; il fait très lourd, impossible d’ouvrir les hublots régulièrement arrosés, on branche le ventilateur de Mamie Belle pour essayer de se reposer dans le carré ; mer hachée, je suis presque malade !
Nombreux cargos, on a du mal à distinguer les terres basses des Bahamas ; en fin de journée, on atteint le Sud de Great Abaco Island, au bout du canal de Providence qui débouche sur l’Atlantique.
Pas d’arrêt prévu aux Bahamas : notre tirant d’eau ne nous laisse pas beaucoup de possibilités et les frais d’entrée s’élèvent à 300 dollars...

Bilan J 2
Position : 25°47’ N ; 77°13’ W
Route : 153M, il reste 2 450M pour les Açores
Moteur : 0H
Bilan énergétique : positif
Pêche : pas de tentative
Repas : hachis parmentier de bananes plantains et fondant au chocolat.

J3 : mercredi 24 mai / jeudi 25 mai
On remonte de nuit la côte de Great Abaco illuminée par des orages (grand largue, force 5 à 6, deux ris et un mouchoir de poche de génois, mer peu agitée à agitée), la navigation est confortable, on arrive bien à se reposer.
Soleil blafard ce matin, à l’Ouest ciel grisâtre, un front froid doit passer devant nous aujourd’hui ; on fait route vers le NNE pour récupérer derrière lui du vent qui nous mènera près des Bermudes.
On croise un navire de guerre des Bahamas qui fait demi-tour sur nous mais s’arrête ; l’exercice du jour ne devait sans doute pas comprendre l’arraisonnement d’un voilier français !
Tri des provisions cubaines : je jette à la mer le pain qui tombe en miettes et moisit, la confiture qui a fermenté et une mangue qui a mal supporté son passage dans le conservateur.
En milieu d’après-midi le temps se couvre, nuages et grains ; le vent tourne, on change de tactique et on bifurque avec lui vers l’Est afin d’éviter cette zone pluvio-orageuse. Grain avec pluie mais sans vent.
Quelques dauphins viennent sauter et s’en vont.

Bilan J 3
Position : 27°58’ N ; 75°18’ W
Route : 159M, il reste 2 294M pour les Açores
Pas de moteur.
Bilan énergétique : à peu près équilibré
Pas de pêche
Repas : sauté de porc à la tomate, flageolets, fondant au chocolat.

J4 : jeudi 25 mai / vendredi 26 mai
La nuit, orage devant nous - on ralentit pour le laisser passer - , puis derrière nous et par le travers, plus éloignés ; on avance assez bien (petit largue, force 5 à 6, mer peu agitée). Un seul cargo sur la route.
Le soleil, voilé ce matin, se montre ensuite. Le vent tourne légèrement au SW et faiblit (grand largue, force 5, mer peu agitée).
Le ciel se couvre en début d’après-midi, premiers coups de tonnerre ; un énorme grain de 9M sur 6 n’arrive pas à nous dépasser, on enroule le génois pour ralentir mais un deuxième le suit...








Un paille-en-queue tournoie autour du bateau.









Un cargo passe derrière nous, dans la brume.

Bilan J 4
Position : 28°26’ N ; 72°12’ W
Route : 159M, il reste 2 138M à parcourir
Pas de moteur
Bilan énergétique équilibré
Pas de pêche
Repas : sauté de porc à la tomate, riz, bananes flambées.

J5 : vendredi 26 mai / samedi 27 mai
Le ciel se dégage un peu, pas d’orage ce soir, la nuit devrait être tranquille ; c’est sans compter sur le pilote qui choisit de disjoncter... Jacques et moi avions pensé, sans oser le dire, que cela faisait longtemps que cela ne lui était pas arrivé !
Le vent faiblit (grand largue, force 4), on largue un ris au changement de quart de minuit.
Petit courant contraire, cela n’arrange pas nos affaires...
On avance dans la brouillasse ; cinquième nuit sans lune, a-t’elle disparu ? Non, elle se montre le jour.
Au petit matin, on empanne et on largue le deuxième ris (grand largue, petit 4, mer peu agitée) ; on n’avance plus, ré-empannage pour essayer de trouver un peu de vent au SE, puis quelques heures de moteur, en vain...
On ralentit pour bricoler sur le pont et sécuriser l’ancre ; au moment de repartir, petit vent de 5 à 7 nœuds de travers, on avance à 3,5 nœuds dans la bonne direction, une aubaine ! On espère en toucher un peu plus demain.
Soleil, ciel bleu, mer belle, cela ressemble à des vacances ; on dessale et on prend une douche bien méritée.

Bilan J 5
Position : 28° 29’ N ; 70° 26’ W
Route : 111 M, il reste 2 054M pour les Açores
Moteur : 3H30
Bilan énergétique : légèrement déficitaire
Pêche : bref essai non concluant
Repas : burritos au sauté de porc, compote de bananes à la vanille.

J6 : samedi 27 mai / dimanche 28 mai
On a retrouvé la lune ! Un très joli croissant qui disparaît bien vite...
Nuit étoilée et tranquille (grand largue, force 3 à 4, mer belle) ; il fait frais et très humide. Trois cargos qu’on ne voit qu’à l’AIS.
On fait route vers l’Est, la route directe serait d’aller vers le NE, mais elle nous obligerait à faire du vent arrière et surtout nous emmènerait vers une large zone sans vent.
Le vent tourne, empannage à 4 heures du matin (petit largue, force 2 à 3, mer belle à peu agitée) ; le soleil devrait nous permettre de recharger les batteries car on ne va pas très vite... Toujours un courant contraire d’un nœud qu’on n’explique pas, alors que le Gulf Stream n’est pas loin ; c’est désespérant, à ce rythme on arrivera aux Bermudes dans une semaine...
Deux paille-en-queue batifolent en poussant des petits cris, un genre d’hirondelle vient se poser sur une barre de flèche.
On a très bien dormi, le rythme est pris.
Bonne fête à toutes les mamans, en particulier à Cécile et à Éliette !
La préparation du spi nous demande plus de temps que d’habitude, on prend des précautions ; bon bord qui nous fait bien progresser vers le NNE (grand largue, force 3 à 4, mer belle) ; comme prévu, on l’affale à 15 nœuds.








Thira sous spi entre Bahamas et Bermudes









Bilan J 6
Position : 29°26’ N ; 69°16’ W
Route : 114M, il reste 1 974M pour Flores
Pas de moteur
Bilan énergétique équilibré
Pêche : rien
Repas : Gratin de bananes plantains, brie danois, quatre-quarts à la papaye.

J7 : dimanche 28 mai / lundi 29 mai
Belle nuit, voie lactée et étoile filante, quelques nuages quand même ; visibilité moyenne ; il fait froid mais moins humide, on supporte bien nos cirés, demain il faudra mettre un pull supplémentaire.
Le vent a tourné et baissé, on doit lofer pour conserver une vitesse correcte mais on s’écarte de la route (grand largue, force 3, mer belle à peu agitée) ; meilleur vent le matin (force 4).
Le vent forcit, un bon 5 ; je réveille Jacques pour remonter les traînes, ranger le spi resté sur le pont et prendre un ris ; tentative de vent arrière, on avance avec un bon cap mais la houle rend le bateau instable et nécessite une surveillance rapprochée... Empannage involontaire maîtrisé par le frein de bôme, on reste tribord amures avec un cap vers l’Est (grand largue, force 5, un ris, mer peu agitée).
Le vent baisse et refuse, on enlève le ris et on empanne.
En une semaine de navigation, on a fait un tiers de la route, de façon très efficace les deux premiers jours, beaucoup moins depuis les Bahamas où nous tirons des bords de largue avec des pannes de vent...

Bilan J 7
Position : 30°38’ N ; 67°59’ W
Route : 132M, il reste 1 886 M pour Flores
Moteur : pas de moteur
Bilan énergétique positif
Pêche : rien, sauf quelques sargasses
Repas : spaghetti à la bolognaise, ananas.

J8 : lundi 29 mai / mardi 30 mai
Étoiles et nuages, Orion au rendez-vous au-dessus du bimini, lune couchée avant minuit. Plancton luminescent dans le sillage de Thira.
Route pas mauvaise vers le NNE (grand largue, force 4, mer peu agitée) mais toujours un petit courant contraire.
Un tanker à éviter occupe une partie de mon quart ; Jacques, lui, essaie par tous les moyens de trouver une solution pour ne pas être emprisonnés demain dans la bulle anticyclonique qui grossit sur les Bermudes...
Soleil puis couverture nuageuse ; pour l’instant, le vent se maintient (force 4 puis 3) et tourne favorablement, mais l’équilibre est toujours instable, les voiles claquent régulièrement en raison d’une petite houle.
Le fil de pêche se déroule après le repas, un gros poisson noir et allongé saute et tire ; Jacques a du mal à le remonter, il essaie de le fatiguer, mais le poisson se libère...
Le vent qui avait faibli tombe en début d’après-midi, on met le moteur en direction des Bermudes.
On s’aperçoit alors que les batteries ne se chargent que par l’hydrogénérateur et les panneaux solaires, l’alternateur ne fonctionne pas ; à voir...

Bilan J 8
Position : 32°01’ N ; 66°40’ W
Route : 121M, il reste 110M pour les Bermudes, 1 790M pour les Açores
Moteur : 3H45
Bilan énergétique : équilibré
Pêche : presque !
Repas : confit de canard, bananes plantains, quatre-quarts à la papaye.

J9 : mardi 30 mai / mercredi 31 mai
Une petite brise se lève au milieu du dîner, on remet les voiles (bon plein, force 3, mer belle) en faisant route sur le Sud des Bermudes. On hésite à s’y arrêter pour faire le plein de fuel si le vent nous lâche encore, ou continuer si la météo est meilleure. En ce moment se déroule la Coupe de l ‘America, peut-être l’occasion d’y faire un tour.
Belle nuit étoilée ; devant nous semble briller un feu de mât, non, c’est Arcturus !
Grand soleil, il se lève plus tôt, mais se couche plus tôt aussi ; a priori, on reste encore à l’heure antillaise. On a très bien dormi cette nuit et ce matin, cela fait du bien.
Alternance de voile et de moteur, puis assez bon bord de près (force 3) ; à midi, le vent tourne par l’Est, virement de bord autour du Sud des Bermudes (bon plein, force 2 à 1), peu de houle mais elle n’a pas tourné et fait battre les voiles. On avance moins vite, mais dans la bonne direction, on décide de ne pas s’arrêter aux Bermudes car cela nous obligerait à mettre le moteur à fond pour y arriver avant la nuit.
Nouvelle panne de vent, brise Volvo... Jacques vérifie l’alternateur et ne trouve rien ; il fonctionne quand on met le moteur, sans doute un faux contact.
Le dessal marche bien.
On termine la journée à la voile sur une mer plate, attendant la risée qui fera grimper la vitesse à plus d’un nœud ! On attache la bôme pour qu’elle ne batte pas ; pas la peine de mettre le moteur, il y a du vent nulle part... Un peu de vent se lève à l’apéro, quand le soleil se couche.
Les épreuves de l’America’s Cup ont été annulées aujourd’hui.
Les Bermudes sont des récifs coralliens baignés par le Gulf Stream, un courant chaud, ce qui explique leur présence à une latitude aussi haute.
Joël nous a fait un topo sur le fameux Triangle des Bermudes, beaucoup de légendes et une réalité géographique :
- le Gulf Stream chaud qui remonte au Nord avec beaucoup de tourbillons
- le courant du Labrador froid qui vient terminer sa course vers le Sud avec sans doute un peu d'upwelling comme au large du Portugal
- des vents qui peuvent être violents en rafales le long de côte Est des USA orientés Nord ou Sud
Ces trois éléments qui créent quasi instantanément des mers énormes et des brouillards intenses entre les USA et les Bermudes, ont eu raison de très gros bateaux sans doute avec des vagues scélérates et/ou des erreurs de navigation à cause du brouillard.
Une raison majeure pour un routage qui éloigne nos petits bateaux de cette zone potentiellement dangereuse.

Bilan J 9
Position : 32°10’ N ; 64°52’ W
Route : 96M, nous sommes arrivés aux Bermudes et à 1 703M des Açores
Moteur : 5H15
Bilan énergétique : équilibré
Pêche : rien
Repas : patates douces en tartiflette, quatre-quarts à la papaye.

J 10 : mercredi 31 mai / jeudi 1er juin
Nuit claire, une petite brise fort agréable s’est enfin levée (près, force 3, mer belle).
On longe la côte des Bermudes et on croise un voilier qui s’éloigne.
La lune se couche, les lumières des Bermudes s’éloignent et disparaissent ; nous sortons des cartes marines, nous voilà lancés sur l’océan avec les Açores comme horizon.
Le vent tourne, nous avec lui ; nous avons un courant favorable d’un nœud.
Au petit matin, le vent faiblit, nous faisons de l’Est (grand largue, force 2) ; la journée est tranquille, ensoleillée, dommage qu’une longue houle de face ait tendance à faire claquer les voiles...
Un peu plus de vent en fin d’après-midi et au coucher du soleil (force 3 à 4).
Le pilote a disjoncté trois fois aujourd’hui, alors qu’il n’était pas violemment sollicité.
A partir de maintenant, nous allons suivre le train des dépressions qui suit dans l’Atlantique Nord, une route NE, des États-Unis à l’Europe ; à nous de profiter des vents portants en nous plaçant en bordure de ces dépressions ; entre deux, des zones de calme...

Bilan J 10
Position : 32° 26’ N ; 62° 55’ W
Route : 91M (un peu plus si on tient compte du courant), il reste 1 610M pour les Açores
Moteur : non
Bilan énergétique : à peu près équilibré
Pêche : bredouille
Repas : Risotto champignons et confit de canard, fondant au chocolat

J 11 : jeudi 1er juin / vendredi 2 juin
Changement de fuseau horaire, UTC -3 depuis hier, il va falloir qu’on modifie progressivement nos horaires de repas pour en être en phase à l’arrivée aux Açores.
Une petite dépression s’annonce pour dimanche 4 ; une autre beaucoup plus vaste se formera près de la Floride le 7 pour arriver le 9 ; elle sera beaucoup plus basse qu’habituellement, l’anticyclone des Açores étant décalé vers le Sud. La préconisation de Joël est de faire de l’Est pendant une semaine afin de la dépasser et de remonter ensuite avec elle vers les Açores avec des vents portants ne dépassant pas 15 à 20 nœuds.
Nuit claire, une demi-lune nous accompagne la première moitié de la nuit.
Le vent s’est levé, on fait route vers l’Est à une bonne vitesse (largue, force 4 à 5, mer peu agitée) ; le vent faiblit le matin et tourne légèrement (grand largue, force 3) ; il se maintient et monte en fin d’après-midi, on prend un ris avant la nuit (largue, force 4, un ris, mer peu agitée). La journée a été ensoleillée avec un vent correct, une navigation agréable et reposante.
Les provisions de produits frais s’épuisent, le pain depuis longtemps, la viande et les œufs depuis quelques jours et on a mangé les derniers fruits et tomates hier ; il nous reste des crackers cubains, du brie danois, du beurre, des patates douces, des fruits déshydratés et de nombreuses conserves. Un poisson frais serait le bienvenu !

Bilan J 11
Position : 32° 28’ N ; 60°23’ W
Route : 129M, il reste 1 493M pour les Açores
Moteur : 0H
Bilan énergétique : positif, batteries chargées à bloc
Pêche : un poisson volant !
Repas : tartiflette de patates douces, brie, fondant au chocolat.

J12 : vendredi 2 juin / samedi 3 juin
Bon vent cette nuit, Thira ronronne (largue, force 4, un ris, mer peu agitée) ; puis au fur et à mesure que le vent monte (force 5), il joue à saute-mouton sur les vagues, on enroule le génois complètement pour dormir.
Temps nuageux ce matin, on croise un cargo.
On cherche une solution pour éviter la pluie de la nuit prochaine, ce serait d’accélérer pour la précéder, il suffirait de faire plus de 7,5 nœuds de moyenne ; on déroule le génois (largue, force 4 à 5, mer peu agitée), moyenne atteinte mais elle sera difficile à garder jusque 23 heures... Une autre solution serait de passer un peu plus au Sud pour avoir moins de vent et de pluie, on lofe de 10°.
Jacques barre une heure pour le plaisir.
A midi, le vent a faibli (force 4) on commence à surveiller le train de nuages qui passe au loin devant nous. Petit grain non violent, le vent revient.
C’est alors qu’on voit le point d’amures du génois batifoler avec sa manille ouverte, Jacques la remet en place sans difficulté, il faudra assurer le manillon.
Prise d’une nouvelle météo pour la nuit, on lofe davantage pour éviter le gros des grains et on prend le deuxième ris ; le vent tombe, on se sent ridicule avec nos deux ris !

Bilan J 12
Position : 32°02’ N ; 57°34’ W
Route : 148M, il reste 1 374M pour les Açores, nous avons fait la moitié de la route
Moteur : 0H
Bilan énergétique à peu près équilibré
Pêche : rien
Repas : petit salé aux lentilles, fondant au chocolat

J13 : samedi 3 juin / dimanche 4 juin
Le vent se lève brusquement en début de nuit, on contourne la zone litigieuse par le Sud (bon plein, force 4, deux ris et génois, mer peu agitée) puis on abat vers l’Est (travers, force 5) ; de petits grains traversent notre route, on les évite au maximum en prenant soin de les suivre au radar ; l'un nous rattrape, pluie et vent pendant cinq minutes, quelques éclairs, on met l’iridium dans le four et on enroule le génois.
La navigation est moins confortable avec une houle courte de travers (force 5 à 6), on joue à la balançoire ; léger courant favorable.
Large couverture nuageuse le matin qui s’épaissit ; crachin breton puis pluie ; à midi, un grain violent mais bref (force 6 à 7, rafales indéterminées), on enroule complètement le génois.
Grosse pluie pendant quelques heures - connexion iridium difficile - , ciel dégagé lors du repas du soir, ciel noir devant...
On prend le troisième ris avant la nuit pour parer à toute éventualité et aussi pour ralentir et laisser s’évacuer la pluie et le vent ; un élastique qui retient la voile sur le mât a sauté, à remplacer lors de la prochaine panne de vent.









Belles couleurs au coucher du soleil








Bilan J 13
Position : 31°54’ N ; 54°32’ W
Route : 147M, il reste 1 236M avant les Açores
Moteur : 0H
Bilan énergétique : équilibré
Pêche : pêcheur en congé dominical
Repas : gratin de patates douces, figues séchées.

J 14 : dimanche 4 juin / lundi 5 juin
Le vent faiblit puis commence à tourner, le ciel se dégage ; à minuit on empanne et on largue le troisième ris (grand largue, force 4, deux ris et génois, mer peu agitée) ; petit courant contraire.
Le matin, on largue tous nos ris (travers devenant près, petit 4 devenant 3, mer peu agitée), on avance assez bien vers l’ESE en attendant la pétole... On attend que la dépression du 8 soit passée pour commencer à monter vers le Nord.
On n’a jamais aussi bien dormi, autant cette nuit que ce matin, cela fait du bien de récupérer.
A l’heure de la sieste, on croise à moins d’un mile un catamaran de 12 mètres, Mandala ; appels VHF et ASN, sans réponse, on est déçus...
Soleil, mais le vent faiblit et tourne ; on s’octroie une heure de moteur avant la nuit pour remettre l’élastique de la voile et modifier la prise du troisième ris.

Bilan J 14
Position : 31°40’ N ; 52°31’ W
Route : 123M, il reste 1 142M pour les Açores
Moteur : 1H
Bilan énergétique : équilibré
Pêche : rien
Repas : taboulé, moules à l’escabèche, fromage danois « tipo Brie », salade de fruits.

J15 : lundi 5 juin / mardi 6 juin
Navigation au ralenti en début de nuit (près, force 3, mer belle) ; en deux semaines, la lune a bien grossi et éclaire la nuit, nuages, quelques étoiles.
Des grains se forment sous le vent mais nous rattrapent ; on échappe au premier et au deuxième, mais avec le troisième, on rentre dans une zone de pluie, sans davantage de vent.
Éclaircies puis à nouveau de la vraie pluie en début de matinée ; ensuite, soleil et pétole, on patiente jusque midi où le vent revient de SSW, comme prévu par Météo France (travers puis largue, force 3 devenant 4, mer belle à peu agitée).
Prise d’un ris avant la nuit, Jacques voit le rayon vert.
A la place de faire du NE pour les Açores, on va se diriger vers le SE pour passer au Sud de la dépression de jeudi, c’est pourquoi on progresse peu sur la route ; on va plutôt vers Madère ou les Canaries !

Bilan J 15
Position : 31°23’ N ; 50°48’ W
Route : 102M, il reste 1 076M pour les Açores
Moteur : 0H
Bilan énergétique : équilibré
Pêche : des sargasses et encore des sargasses, un oiseau vient régulièrement surveiller les rapalas
Repas : burritos à la bolognaise, pâte de goyave.

J16 : mardi 6 juin / mercredi 7 juin
La lune éclaire la nuit, navigation tranquille (largue, force 4, un ris, mer peu agitée), on avance assez bien vers l’Est.
Le pilote disjoncte, pour rattraper rapidement la situation il suffit de le reconnecter immédiatement, encore faut-il être à côté...
Très bonne nuit, je m’endors même pendant mon quart, rappelée à l’ordre par la minuterie que je mets à sonner tous les quarts d’heure ; Jacques utilise son téléphone et s’octroie des pauses de vingt minutes pendant lesquelles il dort régulièrement.
Soleil ce matin ; à la prise de la météo, on lofe vers le SE pour ralentir pendant deux jours (travers, force 4 à 5, deux ris et génois enroulé, mer peu agitée) ; on vise le 30° N, 48° W, ensuite on remontera vers le Nord vendredi, quand la dépression sera passée et que le vent basculera au NE ; navigation reposante à 3 nœuds mais pas hyperconfortable...
Deux cargos se croisent derrière nous.
Toujours pas de poissons mais quelques méduses à voile, transparentes avec un petit liseré bleu, très jolies.

Bilan J 16
Position : 30°47’ N ; 48°33’ W
Route : 120 M, il reste 1 000M pour les Açores
Moteur : 0H
Bilan énergétique : à peu près équilibré
Pêche : rien
Repas : confit de canard, patates douces rissolées à la graisse de canard, crème à la vanille, vin chilien.

J17 : mercredi 7 juin / jeudi 8 juin
Ciel clair, la lune presque pleine illumine la mer.
Navigation frustrante : avoir du bon vent et une mer calme, et marcher au ralenti en s’éloignant des Açores ! De surcroît, on a un courant de plus d’un nœud qui nous entraîne au SW et nous gênera pour remonter. INavX, après nous avoir annoncé une arrivée en janvier 2018, y a renoncé...
Nouvelles données météo au petit matin : la dépression se décale plus rapidement que prévu - on a du mal à s’en rendre compte car notre météo arrive avec 8 heures de retard -, nos Thirarouteurs préconisent de faire route aujourd’hui vers l’ESE ; on déroule le génois (grand largue, force 4 à 5, deux ris et génois, mer peu agitée), c’est meilleur pour le moral ! On avance assez bien, petit courant contraire.
Poissons volants, mais rien à l’hameçon, où sont donc passés les poissons ? Les fils de pêche s’emmêlent et occupent Jacques une partie de l’après-midi...
Fournée de brioches, pas très montées mais bonnes, elles amélioreront nos petits-déjeuners.

Bilan J 17
Position : 29°48’ N ; 46°58’ W
Route : 95 M, il reste 971M jusqu’aux Açores, on a fait enfin les deux tiers de la route !
Moteur : 0H
Bilan énergétique : équilibré
Pêche : rien...
Repas : confit de canard, haricots verts, crème à la vanille.

J18 : jeudi 8 juin / vendredi 9 juin
Pleine lune, ciel clair pour le moment.
Empannage après le repas du soir, on monte enfin vers le Nord mais on doit encore traverser la queue de la dépression en fin de nuit.
On échange nos quarts, je prends le premier moins venté (travers, force 4 à 5, deux ris et demi-génois, mer peu agitée mais désordonnée), et laisse à Jacques le deuxième (petit largue, force 6, trois ris et demi-génois, mer agitée mais mieux formée) ; entre les deux, on prend le troisième ris pour plus de confort.
Un peu de pluie au petit-déjeuner, juste de quoi mouiller les coussins restés dehors.
A 8H20, renverse des vents en cinq minutes, de SW force 6 à NE force 6 ; la première dépression qui nous avait emmenés 200M au Sud est enfin passée, on contourne maintenant la deuxième par l’Ouest.
Une journée entière de navigation sportive (près, force 6, trois ris et un mouchoir de poche, mer agitée avec une houle de face), Thira gite et tape dans les vagues, quelques-unes le submergent, on n’avance pas très vite... On fait du NNW en attendant que le vent tourne, pas encore le NE pour les Açores mais la situation s’éclaircit.
Le vent baisse en fin d’après-midi et la houle s’atténue, on déroule du génois et on marche au bon plein.
Bonne sieste, on a appris à dormir dans toutes les conditions ! Le froid tombe avec la nuit, repas du soir à l’intérieur.

Bilan J 18
Position : 31°54’ N ; 47°08’ W
Route : 137M, il en reste 901 pour Flores
Moteur : 0H
Bilan énergétique : équilibré 
Pêche : les traînes sont au repos
Repas : service minimum, chips de patates douces, toasts à la terrine de volaille boucanier, brie, pâte de goyave.

J19 : vendredi 9 juin / samedi 10 juin
La nuit s’annonce plus tranquille ; le vent baisse, la houle aussi mais de face, elle reste gênante (près, force 5 devenant 4, mer peu agitée) ; on enlève nos ris.
Le vent tourne petit à petit, on gagne vers le Nord, légèrement sur l’Est ; il faiblit (bon plein, force 3, houle résiduelle), on avance lentement mais il y a d’éphémères moments où on marche bien.
La consigne est de faire du moteur à 6 nœuds vers le Nord pour rattraper demain du vent de SW qui nous mènera aux Açores ; quand on le démarre à midi, grosse vibration de l’hélice qui hier était restée bloquée un moment en marche arrière ; on affale les voiles pour arrêter le bateau et Jacques plonge, sécurisé par un bout ; rien dans l’hélice, il arrive à la manipuler ; redémarrage du moteur sans vibration, à revoir aux Açores...
Changement du clou de l’hydrogénérateur qui était tordu.
Au coucher du soleil, cliquetis du moulinet, tous sur le pont ; au bout de la traîne, un petit poisson long avec rostre, bébé espadon ou marlin, qui s’échappe quand Jacques le remonte...

Bilan J 19
Position : 33°42’ N ; 46°44’ W
Route : 117M, il reste 828M avant les Açores
Moteur : 5H30
Bilan énergétique positif, batteries complètement chargées
Pêche : presque...
Repas : spaghetti à la bolognaise, brie, papaye et mangue déshydratées.

J 20 : samedi 10 juin / dimanche 11 juin
Lever de lune sur une mer d’huile ; à minuit, un léger vent qui tourne par l’arrière, pas encore suffisant pour se passer du moteur d’autant plus qu’on a un courant contraire d’un demi-nœud ; le ciel se couvre.
Au lever du jour, le vent est meilleur ; le vrombissement du moteur est remplacé par le clapotis des vagues sur le bateau, la douce musique du vent dans les haubans et plus tard par le ronronnement de Thira et celui du Watt and Sea (grand largue, force 3 à 5, mer belle à peu agitée).
A dix miles devant nous, un cargo parle à un autre bateau dont on n’entend pas les réponses et lui souhaite bonne chance, peut-être un voilier en route vers Flores ?
Empannage puis bord de vent arrière (force 5 devenant 4 puis 3) qui nous mène enfin dans la bonne direction ; un peu instable en raison de la houle, mieux si on borde la voile.
Récupération d’un saladier d’eau de mer sous la couchette avant, problème récurrent quand, comme hier, on prend des paquets de mer dans la baille à mouillage.
Jacques inspecte le câble d’inverseur du moteur, il rajoute un écrou qui semble manquer côté moteur, mais est-ce la cause du problème ? On lance le moteur une heure pour le tester en marche avant et se rapprocher du vent.

Bilan J 20
Position 35°12’ N ; 45°50’ W
Route : 132M, Il reste 748M pour les Açores
Moteur : 10H30
Bilan énergétique : équilibré
Pêche : les lignes s’emmêlent lorsque le système électronique disjoncte, mais cette fois, on arrive à les démêler ; bien sûr, les poissons se contentent de rigoler à l’arrière du bateau.
Repas : Mouton sauté, flageolets et carottes, « crème de guerre » ; la crème de guerre, c’est le dessert que ma maman faisait pendant la guerre avec ce qu’elle obtenait de ses tickets de rationnement ; cela s’apparente à une béchamel caramélisée, meilleure si on peut rajouter des œufs mais on n’en a pas.

J21 : dimanche 11 juin / lundi 12 juin
Ciel couvert et bruine.
On avance tranquillement (petit largue, petit 4) vers le NE et les Açores, enfin !
Les conditions météo sont bonnes les prochains jours mais une forte dépression est attendue sur Flores la semaine prochaine ; nos Thirarouteurs envisagent de nous faire atterrir à Faial, dans le port d’Horta mieux protégé et hors du circuit de la dépression ; 100 miles de plus à faire, mais on n’est plus à une journée près !
Au lever du jour, le vent tourne légèrement et forcit (grand largue, force 5, grand-voile et demi-génois, mer peu agitée mais confuse), on avance vers l’ENE avec près d’un nœud de courant contre nous.
Moins de vent et de houle, bord de vent arrière (force 4), le courant disparaît.
A midi, à côté de nous, Happy Sea un catamaran français parti des Bermudes qui vient de voir passer une baleine entre nous deux ! Échange de procédés d’appel MMSI et d’informations météo, il optera peut-être aussi pour Faial.

Bilan J 21
Position : 35°38’ N ; 43°19’ W
Route : 133 M, il reste 624M pour Flores mais 724 M jusqu’à Horta
Moteur : 0H
Bilan énergétique : légèrement déficitaire
Pêche : rien
Repas : quenelles de brochet sauce Nantua, riz, crème au caramel.

J22 : lundi 12 juin / mardi 13 juin
Ce soir, pas de coucher de soleil, pas de lever de lune, pas d’étoiles mais un ciel bouché, de la bruine et une mauvaise visibilité ; on sera d’autant plus vigilants qu’on sait qu’un voilier tire des bords dans les environs.
Vent arrière puis grand largue quand le vent tourne (force 3 devenant 4) ; au petit matin, le vent tourne dans l’autre sens, on reprend le vent arrière (force 3 puis 4) ; depuis deux jours, cette alternance nous permet de faire un bon cap, mais entre 4 et 5,5 nœuds seulement...
Beau ballet de dauphins à l'aube, avec trois dauphins étoiles ondoyant en parfaite synchronisation ; énormes méduses à voile.
Couche nuageuse moins dense, il faut attendre midi pour avoir du soleil et une belle mer bleue.
Le vent forcit, on empanne pour faire un peu de NE (grand largue, force 5, mer peu agitée), on avance assez bien ; à nouveau un bord de vent arrière (force 4).
Des nouvelles de Happy Sea qui a fait un peu de moteur cette nuit et est à 8 miles devant nous ; plus chanceux que nous, il a pêché un marlin.
Fournée de pain car les crackers cubains s’épuisent.

Bilan J 22
Position : 36°13’ N ; 40°44’ W
Route : 129M, il reste 596M pour Faial
Moteur : 0H
Bilan énergétique : positif, batteries chargées
Pêche : rien, mais du poisson dans les quenelles !
Repas : toasts à l’émietté de thon au piment d’Espelette, quenelles de brochet, riz, papaye et mangue déshydratées

J23 : mardi 13 juin / mercredi 14 juin
Bord de grand largue pour la nuit (force 4 à 5 devenant petit 4) ; on court après le vent au NNE, le problème c‘est que c’est toujours lui qui gagne...
Ciel nuageux le matin et soleil l’après-midi ; on croise une tortue qui ne semble pas très vivace et deux groupes de dauphins peu joueurs.
On rattrape enfin le vent, bord de vent arrière puis empannage et bord de grand largue qui nous mène enfin dans la direction de Faial, ENE (grand largue, force 4 puis 5, mer peu agitée), Thira ronronne et trace !
Jacques essaie de tenter le poisson avec une troisième traîne qui s’emmêle avec les deux autres...
En fin d’après-midi, le temps se couvre, la dépression arrive plus tôt que prévu ; on prend deux ris avant la nuit et on lofe légèrement pour faire de l’Est (petit largue, force 5 à 6, deux ris et tiers de génois, mer agitée).

Bilan J 23
Position : 37°27’ N ; 38°38’ W
Route :  127M, il reste 480M jusqu’à Horta
Moteur : 0H
Bilan énergétique : positif, soleil et vitesse, les batteries sont chargées à bloc
Pêche : rien...
Repas : civet de canard aux cèpes, haricots verts, turron.

J24 : mercredi 14 juin / jeudi 15 juin
Moins de vent pendant la nuit, on déroule le génois et on enlève un ris au premier changement de quart et le deuxième au lever du jour (grand largue, force 4, mer agitée).
Jacques n’a pas réussi à me réveiller à minuit et a pris un très long quart, j’essaie de lui rendre la pareille !
Aujourd’hui, il bichonne ses traînes, leur parle gentiment, change trois fois de leurre et les démêle sans rouspéter : peine perdue, il n’y a même plus de sargasses à pêcher, par contre il perd un rapala...
Confection de brioches.
On croise un tanker gazier et plusieurs cargos ; hier, on a perdu le contact VHF avec Happy Sea qui doit être trop loin devant...
Le temps s’est éclairci, du soleil après la bruine ; on navigue à la lisière d’une dépression que l’on précède et qui doit s’évacuer samedi par le Nord ; trois jours d’un bon vent portant dont on essaie de profiter au maximum, ni trop près, ni trop loin (grand largue à petit largue, force 4 à 5 puis 6, grand-voile et génois, mer peu agitée à agitée) ; on marche bien, dans la direction des Açores.
Au total, une bonne journée ensoleillée avec le vent qu’on aimerait avoir tous les jours !

Bilan J 24
Position : 37°53’ N ; 35°39’ W
Route : 150M, il reste 335M jusqu'à Horta
Moteur : 0H
Bilan énergétique : positif
Pêche : bredouille...
Repas : civet de canard aux cèpes, haricots verts, crème de marron.

J25 : jeudi 15 juin / vendredi 16 juin
Nuit étoilée mais sans lune ; une barre nuageuse sur l’arrière babord annonce la dépression.
Le vent monte, on enroule du génois (grand largue, force 5 à 6, mer peu agitée à agitée) ; on lofe légèrement quand le vent baisse, on abat quand il monte ; on trace à 7 nœuds de moyenne pendant toute la nuit.
Le vent baisse régulièrement dans la journée mais tourne favorablement (travers, force 4, mer peu agitée), on maintient une moyenne correcte.
Une nouvelle dépression arrive lundi, on prévoit donc d’être dimanche matin à Faial en s’aidant du moteur quand notre vitesse descendra en dessous de 5,5 nœuds.
L’anticyclone des Açores est parti en vacances dans le Sud, laissant le champ libre aux dépressions, ce qui n’est pas habituel...
Aujourd’hui, le pêcheur fait grève, on ne mangera pas de poisson.








Fournée de pain de campagne









Encore une très bonne journée de navigation au soleil, on commence à penser à l’organisation de notre visite des Açores.

Bilan J 25
Position : 38°26’ N ; 32°22’ W
Route : 158M, il reste 178M avant Horta à Faial
Moteur : 0H
Bilan énergétique : positif
Pêche : pêcheur en grève illimitée
Repas : toasts tomate mascarpone, petit salé aux lentilles, brie, crème de marrons.

J26 : vendredi 16 juin / samedi 17 juin
La nuit s’annonce calme, le vent se maintient et on marche bien (travers, force 4 à 5, mer peu agitée) ; on croise plusieurs cargos et tankers, et aussi un grand voilier qui se dirige vers Faial.
Un cliquetis de moulinet me tire du lit ; le pêcheur, très malin, n’a pas prévenu les poissons qu’il reprenait le travail ; un s’est laissé prendre, une petite bonite, mais bon, on ne va pas chipoter !








Jacques, tout content de cette première véritable prise de la saison !








Grand soleil, le vent faiblit progressivement, on avance tranquillement à 5 nœuds ou moins (petit largue, force 3, mer belle à peu agitée) ; impossible d’arriver à Horta avant la nuit, on prévoit l’atterrissage pour demain matin à 8 heures.
A priori, l’heure des Açores correspond à UTC, on avance sérieusement nos heures de repas pour être en phase à l’arrivée.
Soudain, une myriade de bateaux apparaît à l’AIS : des cargos, des pêcheurs, quatre voiliers qui convergent vers Horta et vingt bateaux agglutinés (départ d’une régate, non puisqu’ils ne bougent pas de la journée, observation de cétacés ou concours de pêche ?) ; et c’est sans compter tous ceux qui, comme nous, n’ont pas d’AIS, on espère qu’ils nous laisseront une place au port.
La nuit, ils n’ont toujours pas bougé et c’est alors qu’on comprend notre méprise : les bateaux sont dans le port d’Horta ! Sur le PC, on n’a pas de carte, Faial est vaguement dessinée, décalée de 6M au Nord ; sur l’iPad, on a la bonne carte, mais pas l’AIS.
En fin d’après-midi, on met le moteur à 1 200 tours, en soutien des voiles, pour faire du 5 nœuds.

Bilan J 26
Position : 38°31’ N ; 29°19’ W
Route : 141M, il reste 36M avant Horta, on touche au but !
Moteur : 2H30
Bilan énergétique : positif
Pêche : une bonite !!!
Repas : le midi, carpaccio de bonite ; le soir, bonite sauce tomate, macédoine de légumes, crème de marron.

J27 : samedi 17 juin / dimanche 18 juin
Vingt-septième et dernière nuit de navigation !
Beaucoup d’étoiles mais la nuit est brumeuse ; très vite, on voit apparaître les lumières d’Horta et on retrouve un peu de vent (travers, force 3 à 4, mer belle).
En longeant la côte Sud de Faial, on ralentit en enroulant du génois ; lumières blanches le long de la route et lumières rouges sur les reliefs côtiers ; au large, pêcheurs au lamparo.
On contourne la masse noire du Monta da Guia pour entrer dans le canal entre Faial et Pico.
Entrée dans l’avant-port de la marina de Horta au lever du jour, un marinero nous fait mettre à couple le long de la jetée du bassin Sud en attendant l’ouverture de la marina ; on a le temps de ranger le bateau et de déjeuner avant la pluie.
Accueil sympathique, formalités d’immigration et de douanes vite expédiées, les Açores sont portugaises et font partie de la CEE ; amarrage définitif à couple le long de la jetée du bassin Nord ; nous sommes en troisième position, ce qui ne facilite pas les passages à terre mais le bateau est en sécurité. 

Bilan J 27
Position : 38°32’ N ; 28°37’ W
Route : 48M
Moteur : 2H30
Bilan énergétique : équilibré
Pêche : abstinence, pas de pêche la nuit.

BILAN DE LA TRAVERSÉE
En 26 jours et demi, nous avons parcouru 3 469M, alors qu’il n’y a que 2 900M entre La Havane et Horta en ligne directe ; la fuite au Sud pour éviter la dépression et les bords de grand largue expliquent la différence ; l’influence des courants est négligeable bien que le Gulf Stream nous ait bien aidés les deux premiers jours.
Vitesse moyenne : sur l’eau, 5,4 nœuds, mais sur la route directe seulement 4,5 nœuds
Consommation d’eau : environ 300 litres, il nous en reste 160
Consommation de fuel : nous avons fait 35H30 de moteur et utilisé 78 litres de fuel ; nous avions encore droit à 87H30 de moteur, heureusement qu’on n’avait pas acheté d’autres bidons !

Le mot du capitaine
Tout d’abord, il faut reconnaître le cran d’Odile, qui au départ, ne voulait pas traverser seulement à deux ; puis, elle a réussi à se convaincre que nous en étions capables. Oh ! il y a bien eu quelques « j’en ai marre » ou « mais qu’est-ce que je suis venue faire dans cette galère », mais c’était au début, parce qu’il n’y avait pas de vent. Dans les situations délicates, elle s’est montrée à la hauteur et a même eu parfois (pas toujours !) raison contre le capitaine.
Puis la sérénité s’est installée, sûrement grâce à la confiance inébranlable en son capitaine, mais aussi, surtout, parce que nous avions deux anges gardiens-routeurs, Joël et Pierre-Henri, qui veillaient sur nous en surveillant la météo. Avec leurs conseils, nous n’avons jamais été dans une situation critique ; nous terminons fatigués, sûrement, mais pas éprouvés. Nous les remercions chaleureusement pour leur aide.
Et toute cette traversée s’est très bien passée ; 27 jours en mer, ça paraît long depuis la terre, mais à bord, pas tant que cela ; on ne fait pas grand-chose, mais on ne s’ennuie jamais.

Comme tout au long de la traversée, nos Thirouteurs nous ont prodigué moultes injonctions, je les rapporte ici, sous la forme des dix commandements aux Thiranosaures, équipage de Thira :
Toujours tu ménageras ta monture, ainsi Thiraloin,
Jamais tu ne seras Thiranik avec l’équipage,
Au sud d’une dépression, Thiralest, quand elle est passée,Thiranorest,
Si les dieux ne le veulent pas, Thirapala,
Si Poséidon te le permet, Thirailleurs,
Si le pain moisit, tu traiteras le bateau au Thirame,
Jamais tu ne seras Thirauflancs,
Rapidement tu choisiras si Thira ou Thirapas,
En pêche, tu ne lésineras pas sur la qualité de tes Thirapalas,
Et si le sel s’en mêle, tu rinceras tes Thirastas.

Et en conclusion de cette longue transat, cette morale :
Patience et longueur de temps valent mieux que Thirâler ni qu’être Thiraillés par le stress.