Odile et Jacques

Odile et Jacques
Odile et Jacques

mercredi 30 mars 2016

LA GUYANE, UN PEU D’HISTOIRE ...

La Guyane a été découverte par Christophe Colomb en 1498 ; la colonisation a été difficile mais après négociation avec le chef amérindien Cépérou, les Français s’installent sur la colline Cépérou, fondant ainsi Cayenne en 1643.

La Guyane devient une colonie française esclavagiste ; venus d’Afrique, les esclaves travaillent durement dans les plantations de café, cacao et canne à sucre et sont victimes de châtiments corporels ; le « code noir » définit alors leur statut.

Au XVIII° siècle, l’expédition de Kourou est un échec : 14 000 colons européens débarquent et sont victimes de la dysenterie, de la fièvre jaune, du paludisme et de la syphilis ; les survivants s’installent sur les îles du Diable qui seront rebaptisées îles du Salut.

Au XIX°, Anglais et Portugais occupent quelques années Cayenne mais la Guyane redevient française et l’agriculture prospère. L’esclavage est aboli en 1848, « le sol de France affranchit tout esclave qui le touche » ; ceci provoque l’afflux d’esclaves brésiliens et de nombreux conflits éclatent autour de la frontière franco-brésilienne ; la France doit céder une partie de son territoire au Brésil.
Au même moment, on découvre des tonnes d’or dans un affluent du haut Maroni, au Sud-Ouest du pays, c’est le début de la ruée vers l’or avec l’arrivée d’Antillais et d’étrangers ; cependant, l’industrie aurifère a du mal à se développer, l’orpaillage reste aux mains d’ouvriers indépendants et de maraudeurs.
A partir de 1852, l’administration pénitentiaire s’installe en Guyane ; le bagne accueillera 70 000 prisonniers jusqu’en 1938.

La Guyane devient un département d’outre-mer en 1947, puis une région lors de la loi de décentralisation.
Le Centre Spatial Guyanais s’installe à Kourou en 1965 et devient, grâce à Ariane, le plus important site de lancement du monde. 
 

La forêt amazonienne occupe la plus grande partie du territoire, et seul le littoral connait une activité humaine et économique ; les villes portent le nom des fleuves sur lesquels elles sont construites.      

Du jeudi 3 mars au lundi 7 mars 2016: SOURE (ILE DE MARAJO, BRESIL) – CAYENNE (GUYANE, FRANCE) (525M)

J1 : Jeudi 3 mars
Départ de bon matin après un dernier « Au revoir » à Orionde ; nous remontons l’ancre qui se décroche facilement mais le guindeau disjoncte en fin de course ; sortie du rio Paracauari  et entrée dans le rio Para.
C’est alors qu’on se rend compte que les batteries ne se chargent plus ; Jacques remplace le fusible du chargeur qui a fondu, on lui a sans doute trop demandé en remontant le mouillage...
On zigzague pour éviter cinq filets qui dérivent au milieu du rio, certains de justesse ; cela nécessite une veille soutenue et surtout permanente...
Après la pluie, le soleil se montre ; vent de face et un peu de houle, un peu de courant favorable, on avance assez bien jusqu’à la renverse ; croisement de deux cargos dans la porte d’entrée et arrivée à la bouée d’atterrissage en milieu d’après-midi.
Ensuite, il faut mettre le cap au Nord afin d’éviter le plateau au débouché de l’Amazone et le vent NNE n’arrange pas nos affaires.

On louvoie entre les barques de pêche avant de réussir à faire un bon cap en les laissant toutes sous le vent (près, force 4 à petit 5, mer peu agitée, deux ris et génois déroulé) ; on n’avance pas, surtout quand le courant est contraire, le bateau tape dans les vagues.







Coucher de soleil, ciel pommelé










Au milieu de la nuit, on demande à un cargo de se dérouter.
Nouveau passage de l’équateur, on rentre chez nous !
Petit grain puis nuit étoilée, orage sur la côte.

Bilan J1 
Position : 00°37.09 N ; 47°47.81 W.
Route : 100M, il en reste 450.
Moteur : 10H
Bilan énergétique : 2H de groupe électrogène au départ ; on a bien chargé la journée mais beaucoup consommé la nuit .
Pêche : les traînes n’ont pas été mises à l’eau.

J2 : Vendredi 4 mars
Beau temps qui se couvre ensuite ; on avance au gré des marées et des courants, c’est à dire pas très vite ; on largue nos ris (près à bon plein, force 3 puis 4) et on évite encore quelques pêcheurs et leurs filets ; beaucoup de poissons morts au sortir de l’Amazone. 
Le vent tombe puis revient l’après-midi (près, force 4), on reprend un ris ; grains sans trop de vent mais avec beaucoup de pluie ; deuxième ris avant la nuit (force 5), on marche mieux. Visite de quelques dauphins.
Le courant nous pousse vers l’Ouest ; on ne fait pas tout à fait du Nord, mais on suit la ligne des 50 mètres.
Nuit tranquille, pas de grains, peu de pêcheurs, les cargos croisent à babord sur la ligne des 20 mètres ; étoiles et plancton luminescent.

Bilan J2
Position : 02°14,95 N ; 48°19,43 W.
Route : 100M, il nous reste 350M, sans doute un peu moins, car on a pris un raccourci !
Moteur : pas de moteur
Bilan énergétique : équilibré, on charge la journée ce qu’on a déchargé la nuit précédente.
Pêche : traînes au repos.

J3 : Samedi 5 mars
Bon anniversaire Antoine !
Petit grain puis soleil ; bon vent (près, force 5, deux ris et demi génois, mer peu agitée), Thira avance bien avec l’aide du courant Nord équatorial ; des bancs de poissons volants nous accompagnent.
Grosse zone nuageuse en fin d’après-midi, plusieurs grains ; on ralentit pour en éviter un.
Belle nuit, beaucoup d’étoiles, Orion, Croix du Sud, Grande Ourse et deux étoiles filantes ; quelques petits grains quand même.
Trois tankers qui font route vers les USA, nous dépassent.
Bon vent (près puis bon plein, force 4 à 6, mer peu agitée, deux ris et mi-génois) ; au lever du jour, on file à plus de 9 nœuds, des vagues submergent le pont, on enroule le génois et on commence à abattre un peu.

Bilan J3
Position : 04°23,33 N ; 49°51,57 W.
Route : 160M, il en reste 165 pour Cayenne.
Moteur : pas de moteur 
Bilan énergétique : légèrement déficitaire
Pêche : pas de pêche.

J4 : Dimanche 6 mars
On avance toujours très bien (largue, force 5, deux ris et un bout de génois), à plus de 9 nœuds, la houle est moins désagréable.
Hydrogénérateur et panneaux solaires fonctionnent à fond, les batteries sont chargées ; dessalage d’eau de mer peu fructueux.
A l’heure du déjeuner, le moulinet cliquette à toute vitesse ; un très beau poisson saute à la verticale, replonge et arrache l’hameçon, dommage...
On quitte bientôt les eaux brésiliennes pour les eaux françaises ; il faudra enlever le drapeau quand la mer sera plus calme.
On enroule le génois puis on borde la voile au grand largue, afin de ralentir un peu et ne pas arriver à Cayenne de nuit.
En début de nuit, on lofe pour éviter un premier pêcheur, puis on abat pour en éviter un deuxième ; les pêcheurs guyanais ont un AIS et, en principe, pas de filets dérivants parce qu’ils sont interdits en France.
A 3 heures de matin, on se met à la cape près de la bouée d’atterrissage de Cayenne : on hésite encore à aller à Degrad des Cannes ou à Kourou à qui nous avons envoyé un mail hier soir.

Bilan J4
Position : proche entrée Cayenne.
Route : 145M en 20 heures, 7 nœuds de moyenne malgré nos efforts pour ralentir ; il reste environ 20M pour Degrad des Cannes.
Moteur : pas de moteur
Bilan énergétique : légèrement positif, mais on a déchargé en fin de nuit.
Pêche : bredouille...

J5 : Lundi 7 mars
Pas de réponse de Kourou, ni de Cayenne d’ailleurs...
Nous démarrons vers 8 heures par un bord de vent arrière, avant de mettre le moteur pour entrer dans le chenal d’accès au fleuve Mahury ; bien balisé, il chemine entre les îlots du Père et de la Mère, puis entre les bancs de sable, le sondeur indique 2,7 mètres, mais le dragueur anglais nous certifie 5 mètres.






On arrive sans encombre au ponton de Degrad des Cannes qui sert de marina à Cayenne ; 








beaucoup de courant, on s’amarre d’abord à la place de la vedette puis à couple d’un voilier. On retrouve plusieurs bateaux français rencontrés à Joao Pessoa.
Electricité et eau sur le ponton ; désormais, on aura droit à une douche tous les jours.
Cela fait plaisir de trouver ici, de l’autre côté de l’Atlantique, un petit bout de France !

Bilan J5
Position : Dégrad des Cannes
Route : 20 Miles, un record !
Moteur : 3,5 H
Bilan énergétique : équilibré
Pêche : RAS.

Cette navigation, un peu stressante et agitée au début, s’est bien passée et la dernière nuit a été plus reposante ; peu de grains et de pluie, des pêcheurs mais plus de filets dérivants...
En double, la priorité est de faire marcher le bateau, puis de manger et surtout de dormir, quelle que soit l’heure ; on s’est aussi un peu économisés en le sous toilant .

mardi 29 mars 2016

Du vendredi 26 février au mercredi 2 mars 2016 : VISITE de L’ILE DE MARAJO

Marajo est une île fluviale aussi grande que la Suisse, située entre les fleuves Amazone et Tocantins du delta amazonien et l’Océan Atlantique. A l’Ouest, la forêt primaire, à l’Est, des prés en grande partie inondés lors de la saison des pluies.
Les premiers habitants, les Marajoara, vivaient dans des maisons collectives ; la civilisation disparaît vers 1300, nous laissant de nombreuses poteries, notamment des urnes funéraires décorées de motifs géométriques ou anthropomorphiques.
Marajo est peuplée de buffles d’eau qui viendraient des Philippines et se seraient échappés d’un bateau en route vers la Guyane ; il y a des buffles pour la viande - les filets sont extrêmement tendres - , ceux pour le lait - on en fait du bon fromage - , et d’autres plus robustes qui servent d’animaux de trait.

Soure







Soure, la ville principale de l’île de Marajo est bâtie en quadrillage 
autour du petit port ;












les rues, parallèles au rio, sont larges, plantées de manguiers,








les traverses, perpendiculaires, sont plus étroites ; très peu sont goudronnées, quand il pleut - et il pleut tous les jours -, on patauge...







Buffle attelé,  













un autre attend son tour devant le marché de viande !









La religion est très présente, les nombreuses églises évangéliques font recette ;






devant l’église, une urne funéraire amérindienne ; 













cette maison promeut le pèlerinage du Cirio, la paix et affiche sa foi en Jésus ;












chez Patu Anu, où l’on mange de l’excellent filet de buffle, la Cène décore le restaurant !









Fazenda Bom Jesus
Les fazendas sont de grandes propriétés terriennes qui vivent de l’élevage de buffles et de zébus, ces vaches à bosse.







Fazendeiro  









Après un petit tour de buffle devant le moulin qui sert à puiser l’eau,






on fait une grande promenade à travers de beaux paysages plats et verts, 













où paissent chevaux 













et buffles. 













Les buffles taillent les arbres à leur hauteur 







  





et nagent d’une rive à l’autre,













comme ces cochons d’eau qui s’enfuient à notre approche ;












les prés sont en partie inondés et les sols gorgés d’eau, une grande sérénité se dégage de l’ensemble.








Notre guide nous montre aussi de nombreux oiseaux : un aigle pêcheur, des perroquets qui s’envolent toujours en couple, des japins qui volettent de branche en branche,







un tésouré, oiseau à longue queue,













des guaras ou ibis rouge, emblématiques de la région.













Après la promenade, petit repas de spécialités locales à la fazenda : fromage de buffle, gâteau de tapioca, jus acérola











Praia Barra Velha







On emprunte une passerelle en bois à travers la mangrove   












pour arriver à la Praia Barra Velha sur le rio Para, une très belle plage de sable blanc bordée de paillotes. 








Le retour se fait par la plage, la promenade est très belle, je ramasse des rejetons de manguiers pour les replanter ; 






le rio amène aussi de la vase noire et gluante et petit à petit gagne sur la mangrove ;












il faut vite enjamber de nombreux troncs d’arbres avant la marée haute,












pour arriver bientôt à une langue de sable où pêchent les aigrettes ; 











le moteur de la barque ne démarre pas, on a les pieds dans l’eau quand Harold arrive enfin avec un autre moteur datant de Mathusalem ! 











Remontée d’un igarapé,













les pêcheurs relèvent leurs pièges à crevettes ;








au milieu de la verdure luxuriante, on voit des fleurs rouges et des clochettes blanches ; de très beaux papillons bleus, les morphos, butinent et des petits poissons nagent les deux yeux à la surface, comme des bébés crocodiles !







Au retour, la maison du pêcheur ;













son fils, jeune monteur de buffle. 









Un boto, dauphin d’eau douce plonge devant nous.

Formalités de sortie à Belém
Patrick et Monique nous gardent Thira pendant que nous prenons l’expresso Tapajos pour Belém ; on passe deux nuits au Massilia, tenu par Frank, un marseillais : cuisine française où l’on sert des escargots, des cuisses de grenouille, de la bouillabaisse et de la tartiflette ! Jacques craque pour le steak tartare haché à la main.
Une journée, c’est le minimum pour faire les formalités de sortie du Brésil, pour nous et pour Thira : jeu de piste pour trouver la police fédérale (porte 17) et la recette fédérale (porte 10), cela parait simple mais on y passe la journée : impossible d’y accéder de l’intérieur du terminal, il faut faire un long détour par l’extérieur et revenir, mais le policier est en « opération », on doit y retourner l’après-midi...

Retour à Soure
Pendant que Manoel le torneador nous façonne trois tiges métalliques pour maintenir l’hydrogénérateur dans l’eau, nous faisons quelques dernières courses afin d’épuiser nos réals : filet et fromage de buffle, spécialités de Marajo.
C’est l’heure pour Monique et Patrick de rentrer en France ; merci à vous deux pour les bons moments passés ensemble à notre bord et pour votre soutien moral pendant notre traversée du Nordeste ; Patrick est un « antiprocrastinateur », tout problème qui lui est soumis est résolu à l’instant !
Sympathique soirée à bord d’Orionde arrivé aujourd’hui à Soure ; on a l’impression de connaître Yves et Christine depuis longtemps !  
Soure a été une étape agréable, facilitée par la présence d’une communauté française implantée ici depuis de longues années ; les deux agréables promenades sur Marajo ont été organisées par Thierry de la pousada O Canto do Francès.

Nous quittons ainsi le Brésil qui nous a accueilli trois mois, le temps de découvrir cet immense pays ; nos préférences vont à Ouro Preto du Minas Gerais, aux chutes d’Igaçu, ainsi qu’aux îles de Fernando de Noronha et de Marajo.
La navigation le long du Nordeste brésilien n’est pas des plus passionnantes : il n’y a pas de marina et les mouillages dans les rios limoneux ne permettent pas la baignade ; quand l’eau est claire, il y a des requins...
Nous avons aussi souffert de cette chaleur humide, où la simple idée de faire quelque chose est fatigante ; les vaigrages et entourages de hublots ont moisi en une semaine de navigation sous grains.
Les Brésiliens sont en général très serviables et soucieux de notre sécurité, nous mettant en garde contre les indélicats.
Il reste encore beaucoup à faire pour développer le pays où les inégalités sont criantes ; le pouvoir est à la merci des grandes fortunes et la période d’instabilité que traverse le Brésil n’arrangera pas les choses...